Ciel-alouette, certains te nomment ainsi, ta flêche ailée
s'élançant des semailles, monte vers le ciel comme une fusée.
Lorsque j'entends les cris que tu pousses en traversant les nuages, je crois voir la traînée
de lumière et la pluie d'étincelles que la fusée laisse après elle.
Ciel-alouette, que ton nom et ton chant sont beaux, mais que ta robe est donc grise ! Ne
t'appelle-t-on pas aussi : grise-alouette ?
_Si je suis grise, c'est que je vogue à la voile et que j'aime à naviguer vent-arrière, tout
comme les bateaux aux voiles grises.
_Ciel-alouette, grise-alouette, air-alouette, en route, vers le ciel, va, grisolle clair dans
ta course sublime !
Va, ma belle, chante et vogue. Je te vois et t'entends trop rarement, et il m'est bon, soir et
matin, de te voir et de t'entendre.
Planant au milieu des oeuvres du monde, tu réconfortes celui qui peut à tout instant te suivre
des yeux, qu'il sème, qu'il bêche ou qu'il plante.
Hélas, tu montes trop souvent en vain vers le ciel, car personne, petite chétive, ne se soucie
de ton chant.
Eh ! Si personne ne veut t'écouter, je t'écouterai, moi.
Tu me consoleras, dans cette vallée de larmes, et, si personne ne nous voit, ce n'est rien
!
Alors, air-alouette, je ressusciterai, je mettrai à la voile et voguerai, allégée de toute
peine, vers ces hauteurs d'où tu salues l'aube et l'Orient, vers ces contrées où me guide ton vol sonore, vers ces régions sereines d'où je ne redescendrai jamais, jamais plus, car tout sur
terre sera fini pour moi !
Traduit, en partie, d'un texte de Guido Gezelle.